Étudier à l'université ou en haute école n'est pas gage de bonne orthographe ni de maîtrise de la langue française. Ils sont nombreux, parmi les professeurs du supérieur, à s'inquiéter du niveau de français de leurs étudiants, y compris dans les facultés qui forment les futurs enseignants.
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Les professeurs d’université désespérés par le niveau d’orthographe des étudiants : “Même des mots courants ne sont plus compris”
Publié le 04-02-2023 à 10h29 - Mis à jour le 04-02-2023 à 12h44
Étudier à l’université ou en haute école n’est pas gage de bonne orthographe ni de maîtrise de la langue française. Ils sont nombreux, parmi les professeurs du supérieur, à s’inquiéter du niveau de français de leurs étudiants, y compris dans les facultés qui forment les futurs enseignants.
”De plus en plus d’étudiants du supérieur ont des difficultés avec l’orthographe mais aussi avec la syntaxe et le vocabulaire. Il y a des mots courants qu’ils ne comprennent pas, alors qu’on les rencontre régulièrement dans la presse et à la radio. On les sent démunis face à la langue, qui plus est quand le niveau est soutenu”, constate ainsi Olivier Delsaux, professeur de grammaire et d’orthographe française à l’UCLouvain.
”Il y a des mots qui me semblent évidents et qui ne sont plus compris. Quand je leur demande de 'commenter une assertion', ils ne comprennent pas de quoi il s’agit, c’est un mot trop compliqué pour eux. J’ai aussi le sentiment qu’ils ne parviennent plus à prendre des notes correctement”, observe de son côté Anne Dister, professeur de linguistique et d’histoire de la langue française à l’université Saint-Louis.
Même constat pour Marielle Maréchal, professeur de français à l’université de Liège. “
On est tous désespérés par le niveau de certains élèves. Certains d’entre eux vont devenir logopèdes et seront amenés à soigner des enfants dyslexiques alors qu’ils ne sont pas capables d’écrire correctement. Ils font des fautes énormes, s’ils se relisaient ils devraient normalement s’en rendre compte mais ce n’est pas le cas. Ils écrivent aussi des phrases qui ne veulent absolument rien dire avec par exemple des participes passés qui se transforment en impératifs. J’ai déjà vu le mot “livresque” orthographie 'l’ivresseque”, ce qui ne veut strictement rien dire. Il y a un vrai problème de compréhension. Même en ne connaissant pas le mot livresque, ils devraient se rendre compte avec le contexte qu’il est question de livre et non pas de consommation d’alcool. Mais le plus grave selon moi, c’est le niveau d’orthographe grammaticale : des sujets accordés au pluriel pour des verbes au singulier ou le contraire”, déplore l’enseignante. Les difficultés sont telles que les étudiants échouent souvent plusieurs fois au même examen sans pour autant s’améliorer. “J’ai des élèves qui ont passé l’examen de français six fois sans le réussir ! On ne leur demande pourtant pas de comprendre Proust mais de comprendre un texte simple”, souffle-t-elle.
”Des difficultés qu’ils traîneront toute leur vie”
”L’orthographe n’est plus vraiment enseignée en tant que telle. On estime que c’est à l’enseignement primaire de prendre en charge cet apprentissage et je pense que c’est une erreur. On fait passer en secondaire des élèves qui ont de graves lacunes. Pour le CESS, l’orthographe représente 5 ou 10 % de la note. Un étudiant qui a des lacunes peut donc tout à fait réussir ses secondaires. Ce système permet à des étudiants de laisser de côté la maîtrise du français. Ils se retrouvent alors avec un handicap qu’ils traîneront toute leur vie”, estime Olivier Delsaux.
Et si le problème était l’orthographe française en tant que telle ? “
Je pense qu’il faut désacraliser l’orthographe. On n’ose pas toucher à l’orthographe et les ministres de l’enseignement estiment qu’ils ont d’autres chats à fouetter mais en simplifiant l’orthographe on résoudrait en partie le problème. Selon une étude, les élèves consacrent 50 heures de leur scolarité à l’accord du participe passé. En simplifiant la règle, on gagnerait un temps précieux pour étudier d’autres aspects de la langue”, suggère Anne Dister.
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Étonnant, merci le nivellement par le bas ... Pardon, nivèlement maintenant