En raison des quotas fédéraux qui limitent la délivrance des numéros Inami à la sortie des études de médecine, les universités de la Communauté française délivrent à la fin de la première année de médecine un certain nombre d'attestations permettant de passer en deuxième année. Certains étudiants se voient dès lors recalés alors qu'ils ont réussi -parfois avec distinction- leur première année.
Pourquoi toujours mélanger quota de diplômés et quotas INAMI ?
Comment pouvons-nous déjà nous soucier d’un numéro INAMI pour des étudiants qui commencent des études aussi longues et passionnantes? Que sera l'Inami dans dix ans? Que sera la Belgique dans dix ans ? Comment sera le monde dans dix ans? Quelle sera l'ambition du jeune étudiant d'aujourd'hui dans dix ans? Comment parler de numéro administratif au jeune étudiant qui entame des études qui correspondent le plus souvent à une vocation depuis l'enfance? Pourquoi ne pas se soucier aussi de savoir si l'Etat pourra pensionner suffisamment de médecins dans quarante ans ?
Pourrait-on, par exemple, fixer un quota de licenciés en droit de peur que l’Etat ne puisse pas leur garantir à chacun un cabinet d’avocat, une charge de notaire, ou une fonction de magistrat, de fixer un quota de licenciés en journalisme de peur que l’Etat ne puisse pas leur garantir à chacun une carte de presse, de fixer un quota de licenciés en économie, parce que l’Etat craint de ne pas pouvoir leur garantir à chacun une place de dirigeant d’entreprise, de fixer un quota de licencié en sciences politiques pour que l’Etat puisse leur garantir à chacun une fonction publique… ?
Construisons-nous trop de maisons s’il y a plus d’architectes ? Faisons-nous plus de procès s’il y a plus de juges ou d’avocats ? Construisons-nous plus de ponts s’il y a plus d’ingénieurs ? Allons-nous plus chez le médecin, dépensons-nous plus en soins de santé s’il y a plus de médecins ? Cela n’est pas sûr et dépend d’innombrables facteurs autres que le nombre de diplômés.
La presse, le droit, l’économie, le politique, la santé…, sont des piliers de toute société démocratique. Une société peut être jugée notamment sur le nombre de diplômés de haut niveau qu’elle produit. Il ne devrait pas être question de fixer des quotas de journaliste, d’avocats, d’économistes, de politiciens et de médecins, libres, indépendants, et responsables des fonctions essentielles de la société.
Il peut y avoir des examens d’entrée ou des exigences de résultat pour veiller à ce que ces rouages essentiels soient de la meilleure qualité possible, mais que nous nous croyions capables de décider de combien de juristes, polytechniciens, journalistes, économistes, politiciens, ou médecins la société aura besoin pour fonctionner correctement est une tentation totalitaire ou corporatiste.
Si le numéro INAMI est nécessaire pour exercer la médecine, chaque docteur en médecine doit en recevoir un. Mais pourquoi vouloir garantir à tous les docteurs en médecine un remboursement de toutes leurs prestations si l’Etat n’est pas assez riche pour cela. Les diplômés en médecine sont adultes, ils ont des compétences uniques, de vastes connaissances scientifiques et humaines, une magnifique formation, un diplôme prestigieux, et ils trouveront toujours à employer utilement et lucrativement (s'il le veulent) les talents acquis grâce à leur diplôme, en Belgique ou dans le vaste monde, en médecine, dans un métier de la santé, dans la recherche, ou dans d'autres professions ou fonctions de haut niveau.