Pourquoi la démonstration de Meyssan est cousue de très gros fils blancs
New York de notre correspondant
Un titre : l'Effroyable Imposture». Un sous-titre plus «clair» : «Aucun avion ne s'est écrasé sur le Pentagone.» Sur Internet d'abord, et maintenant dans un livre, Thierry Meyssan, président du Réseau Voltaire, prétend que le vol 77 d'American Airlines n'a jamais frappé le Pentagone (département de la Défense américain, sis sur les bords du Potomac, à Arlington, Virginie, en face de la capitale, Washington). Partant de cette «démonstration» en 16 pages, Meyssan développe en quelque 235 pages (plutôt fastidieuses) une série d'allégations délirantes cherchant à accréditer l'existence d'un vaste complot au sein de l'appareil d'Etat américain impliqué dans les attentats terroristes du 11 septembre. Coups de projecteur sur quatre des mensonges sur lesquels reposent les élucubrations du pseudo-«enquêteur» Meyssan.
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1 Il n'y avait pas d'avion, car il existe peu de témoignages et ils sont contradictoires
Faux. En réalité, des dizaines, voire des centaines de personnes ont vu l'avion s'écraser sur le Pentagone le 11 septembre, et nombre de leurs témoignages ont été recueillis par la presse américaine (cf. le Washington Post du 11 septembre), comme celui de Steve Patterson, un designer graphique, de Kirk Milburn, employé par la firme Atlantis Co, ou encore de David Winslow, journaliste de l'Associated Press. Allan Wallace, lui, est un pompier de Fort Myers, en Virginie. Le 11 septembre, il était assigné dans l'une des casernes proches du Pentagone, qui est chargée de l'assistance aux hélicoptères qui décollent périodiquement du département de la Défense. Joint par Libération, il raconte ce qu'il a vu. «J'étais environ à 10 mètres de la façade ouest du Pentagone près d'un camion, avec deux autres pompiers. Je regardais le ciel et, soudain, j'ai vu un avion qui venait de passer au-dessus de l'autoroute, à très faible altitude. On s'est alors mis à courir dans la direction opposée à l'avion. Je ne l'ai pas vu percuter l'immeuble, mais on a entendu un bruit énorme. Quand je me suis retourné, c'était pour voir une énorme boule de feu. Je me suis jeté à terre, mais j'ai quand même été brûlé au second degré aux bras, comme les deux autres pompiers. Ensuite, on a essayé de faire démarrer notre camion pour aller aider, mais il était à moitié brûlé lui aussi et a refusé d'avancer.»
2 Il n'y avait pas d'avion, car il n'y avait pas de débris.
Faux. Il existe des photos de débris (photos sur le site
www.snopes2.com). Surtout, toutes les personnes qui sont arrivées sur le lieu du sinistre dans les minutes qui ont suivi la tragédie ont vu ces débris. Arthur Santana, journaliste du Washington Post, qui a participé aux premiers secours, écrit dans un article publié le 13 septembre : «Des sauveteurs ramassaient des morceaux de l'avion un peu partout. Les morceaux étaient enfouis dans des sacs en plastique marron qui étaient marqués des lettres "preuves matérielles" ("evidence", en anglais), et une partie de cette zone a été entourée de scotch jaune. Un gros morceau de l'avion, soulevé par deux personnes, laissait clairement voir la lettre "C" d'American Airlines.» Un autre témoin, Mike Walter, du quotidien USA Today, qui, alors qu'il se trouvait sur l'autoroute 27, a vu lui aussi l'avion tourner pour «plonger» ensuite vers le Pentagone, témoigne à Libération : «Après l'explosion, j'ai marché en direction du Pentagone. J'étais à plus de 100 mètres de l'impact, mais il y avait des morceaux de fuselage un peu partout. Plusieurs fois, j'ai dû enjamber des débris. Je me souviens même de quelqu'un qui a ramassé un morceau et s'est fait prendre en photo, avec le Pentagone en arrière-plan.» Le journaliste confirme toutefois que les débris de l'avion n'étaient pas de grosse taille. Ce qui n'étonne pas les experts des accidents aériens. «Le choc a été tel que l'avion s'est littéralement pulvérisé, estime un spécialiste qui collabore à la reconstruction du Pentagone. Certains morceaux ont été retrouvés à près d'un kilomètre du point d'impact. Beaucoup de débris de l'avion ont également fondu sous la chaleur intense.»
3 Il n'y avait pas d'avion, car il existe très peu d'images
Certes, il existe moins d'images de l'attaque contre le Pentagone que de celles contre le World Trade Center. La raison en est simple : tout ce qui touche au département de la Défense est confidentiel, d'autant que la sécurité nationale est en jeu. Selon Chris Murray, porte-parole du FBI à Washington, «il ne faut pas oublier qu'une enquête est toujours en cours. Tous les éléments de l'enquête seront ensuite transmis au procureur, qui décidera ce qu'il faut en faire. Pour l'instant, par exemple, les pièces de l'avion sont stockées dans un entrepôt et elles sont marquées des numéros de série du vol 77.» L'une des deux boîtes noires, celle qui enregistre la trajectoire de l'appareil, a été retrouvée. L'autre, qui aurait permis de comprendre les dernières conversations dans la cabine des pilotes, a été sérieusement endommagée et serait inutilisable. Enfin, selon des informations obtenues pas Libération, une vidéo filmée par les caméras de sécurité du Pentagone montrerait l'approche de l'avion sur le bâtiment. Une information «ni confirmée ni démentie» par le département de la Défense. Des images de l'impact, provenant probablement de la même vidéo, ont été publiées par Libération (numéro daté 16 mars).
4 Il n'y a pas eu d'avion, car on ne sait rien des passagers
Faux. Meyssan feint de s'interroger : «Qu'est devenu le vol 77 d'American Airlines, ses passagers sont-ils morts ?» Une interrogation de mauvaise foi (au mieux) ou de la désinformation volontaire. La liste des 64 passagers du vol 77 d'American Airlines est parfaitement connue et disponible auprès de tous les organismes officiels et des associations de parents de victimes. En dehors des six membres du personnel de bord, elle débute alphabétiquement par Paul Ambrose, 32 ans, de Washington, et se conclut à Yuguang Zheng, une citoyenne chinoise. Souvent, les corps ont été identifiés par leurs proches, par des effets personnels, des tests dentaires. «Ma femme, Lisa Raines, était dans le vol 77, a confié à Libération Steve Push, de l'association Families of September 11. Elle a été identifiée grâce à ses empreintes digitales. J'ai un certificat de décès et j'ai pu l'enterrer. Je ne comprends pas ceux qui essaient de faire croire à un complot. Elle était bien dans l'avion et son corps a été retrouvé au Pentagone. Une autre passagère, Barbara Olson, une commentatrice politique connue, a même pu appeler son mari deux fois pour lui dire que l'appareil était détourné et que des pirates de l'air en avaient pris le contrôle.».
Ceux qui veulent juger de la crédibilité de L'effroyable imposture peuvent se référer aux sites suivants:
www.hoaxbuster.com/hliste/02_02/pentagon.htm (en français)
www.snopes2.com/rumors/pentagon.htm
www.truthorfiction.com/
www.urbanlegends.about.com/