Interview du recteur de l'UMons, Phillipe Dubois il y a quelques temps.
Quand tu vois les autres qui parlent de sous-localisme à coté, c'est à pleurer franchement.
Quel rôle précis l’institution peut-elle jouer dans le développement du Hainaut ?
Nous avons un rôle à l’entrée et à la sortie. À l’entrée, d’abord. On essaie d’aller chercher nos étudiants dès le plus jeune âge possible en organisant l’université des enfants. Nous les accueillons dans nos murs pour faire comprendre aux enfants et surtout à leurs parents que, oui, l’université leur est aussi accessible. Je sais de quoi je parle. Je suis issu d’un milieu très humble, très modeste. Mon père était mineur de fond. L’accès à l’université était quasiment impossible à mon époque. Aujourd’hui, je veux témoigner que cet accès à l’université est envisageable pour tous. Je dis souvent qu’on a d’excellents étudiants en puissance ici mais ils ne le savent pas encore. Ce sont des diamants bruts. Notre rôle, c’est de les tailler. D’autant que le taux d’accès à l’université reste plus faible qu’ailleurs en Belgique. Il nous faut donc avoir un effet attractif, d’aimant. Mais trop souvent cet aimant ne peut fonctionner que sur une courte distance : le bachelier. A l’inverse, depuis que nous organisons le master en pharma, il y a un effet attractif à l’entrée. Savoir qu’on offre les deux cycles attire encore plus d’étudiants. On recrute donc des jeunes qui n’auraient pas réalisé des études de pharmacie si on n’avait pas offert les deux cycles. Aller à Bruxelles est un frein pour certains. Et ce n’est pas pour rien que je demande, avec notre partenaire ULB, le master en médecine et en droit.
On pourrait tout de même considérer qu’aller à Bruxelles, ce n’est pas le bout du monde ?
Je comprends la question mais il faut interroger nos étudiants : ils préféreraient réaliser l’entièreté de leur cursus ici. Et ça veut dire aussi qu’il y a des étudiants qui ne se sont pas inscrits en début de bachelier parce qu’ils savent d’entrée de jeu qu’ils ne pourront pas tout faire ici, qu’à un moment donné ils devront se rendre à Bruxelles et qu’ils n’en auront pas les moyens. L’intérêt aussi, c’est qu’ils viendront faire leurs stages chez nous et, qu’en fonction de leurs capacités et motivation, on les maintiendra chez nous. Parfois, on me dit que 60 km, ce n’est pas grand-chose… Détrompez-vous, c’est énorme. C’est tellement énorme que c’est un frein pour nombre de familles, pour des étudiants potentiels qui sont seuls à subvenir à leurs moyens. Donc, si on veut qu’ils fassent des études cette proximité est nécessaire.
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Vous parliez de la sortie…
Force est de constater que le retour des Hennuyers de source pour exercer leur profession surtout en médecine générale, n’est pas là. Il en va de même pour les avocats. Ils savent qu’économiquement ils ont parfois plus d’intérêt à se développer dans la capitale, ça m’attriste énormément. Donc, l’idée de pouvoir leur offrir ce master dans notre province, c’est aussi de pouvoir réaliser leurs stages localement et de prendre goût à la médecine ici et relever évidemment le nombre de médecins dans le Hainaut. Un exemple : nous avons 1,3 généraliste pour 1.000 habitants contre 2,1 dans le Brabant wallon. Un autre qui m’angoisse énormément, c’est l’âge des médecins généralistes : dans le Hainaut, 53 % ont plus de 60 ans. Si ça continue, on sera en pénurie profonde très rapidement. Les chiffres sont là. Je n’ai pas d’autre choix. Je serais irresponsable de ne pas écouter ce qu’on dit, je suis poussé dans le dos pour déposer des demandes d’habilitation pour le master en médecine mais également en droit. Le processus est entamé depuis mars dernier, l’idée est de travailler en co-diplomation avec l’ULB.
Au risque de peser sur le budget de la Fédération Wallonie-Bruxelles ?
Ce n’est pas parce que les étudiants viennent faire des études ici que ça coûtera plus cher. Comme on parle de co-diplomation, les cours seront partagés, les stages seront partagés… il en ira de même pour le financement. C’est une autre localisation des étudiants, l’essentiel des cours sera donné ici, mais ça ne coûtera pas plus cher. Ma certitude est que notre province doit sortir de ce marasme. En fait, je veux une université internationalement reconnue – ce qui est bien le cas dans certains domaines comme l’ingénierie des matériaux – tout en étant ancrée territorialement
Quel rôle précis l’institution peut-elle jouer dans le développement du Hainaut ?
Nous avons un rôle à l’entrée et à la sortie. À l’entrée, d’abord. On essaie d’aller chercher nos étudiants dès le plus jeune âge possible en organisant l’université des enfants. Nous les accueillons dans nos murs pour faire comprendre aux enfants et surtout à leurs parents que, oui, l’université leur est aussi accessible. Je sais de quoi je parle. Je suis issu d’un milieu très humble, très modeste. Mon père était mineur de fond. L’accès à l’université était quasiment impossible à mon époque. Aujourd’hui, je veux témoigner que cet accès à l’université est envisageable pour tous. Je dis souvent qu’on a d’excellents étudiants en puissance ici mais ils ne le savent pas encore. Ce sont des diamants bruts. Notre rôle, c’est de les tailler. D’autant que le taux d’accès à l’université reste plus faible qu’ailleurs en Belgique. Il nous faut donc avoir un effet attractif, d’aimant. Mais trop souvent cet aimant ne peut fonctionner que sur une courte distance : le bachelier. A l’inverse, depuis que nous organisons le master en pharma, il y a un effet attractif à l’entrée. Savoir qu’on offre les deux cycles attire encore plus d’étudiants. On recrute donc des jeunes qui n’auraient pas réalisé des études de pharmacie si on n’avait pas offert les deux cycles. Aller à Bruxelles est un frein pour certains. Et ce n’est pas pour rien que je demande, avec notre partenaire ULB, le master en médecine et en droit.
On pourrait tout de même considérer qu’aller à Bruxelles, ce n’est pas le bout du monde ?
Je comprends la question mais il faut interroger nos étudiants : ils préféreraient réaliser l’entièreté de leur cursus ici. Et ça veut dire aussi qu’il y a des étudiants qui ne se sont pas inscrits en début de bachelier parce qu’ils savent d’entrée de jeu qu’ils ne pourront pas tout faire ici, qu’à un moment donné ils devront se rendre à Bruxelles et qu’ils n’en auront pas les moyens. L’intérêt aussi, c’est qu’ils viendront faire leurs stages chez nous et, qu’en fonction de leurs capacités et motivation, on les maintiendra chez nous. Parfois, on me dit que 60 km, ce n’est pas grand-chose… Détrompez-vous, c’est énorme. C’est tellement énorme que c’est un frein pour nombre de familles, pour des étudiants potentiels qui sont seuls à subvenir à leurs moyens. Donc, si on veut qu’ils fassent des études cette proximité est nécessaire.
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Au risque de peser sur le budget de la Fédération Wallonie-Bruxelles ?
Ce n’est pas parce que les étudiants viennent faire des études ici que ça coûtera plus cher. Comme on parle de co-diplomation, les cours seront partagés, les stages seront partagés… il en ira de même pour le financement. C’est une autre localisation des étudiants, l’essentiel des cours sera donné ici, mais ça ne coûtera pas plus cher. Ma certitude est que notre province doit sortir de ce marasme. En fait, je veux une université internationalement reconnue – ce qui est bien le cas dans certains domaines comme l’ingénierie des matériaux – tout en étant ancrée territorialement