Autre avis que j ai trouvé dans une des sections commentaires sur rue89:
Je vis en Suisse romande et j’ai voté non.
Cela dit, l’analyse du vote dans cet article et dans la presse française en général me paraît un peu courte. C’est un vote complexe, mais il ne se laisse pas réduire à une question de rejet de l’immigration. Bien-sûr, les xénophobes (il y en a autant en Suisse qu’ailleurs, mais pas forcément plus !) ont voté oui. Il y a aussi une indéniable dimension de peur de perdre son emploi, et de ce point de vue les différences cantonales reflètent non seulement des attitudes culturelles différentes face à l’étranger, mais aussi l’implication des gouvernements cantonaux pour surveiller les conditions du marché du travail : les cantons francophones ont fait beaucoup, les germanophones moins et le Tessin beaucoup trop peu. C’est aussi une des clés du vote. Mais tout cela ne fait pas à mes yeux une explication suffisante, car en additionnant le vote UDC traditionnel (30%) et une part d’électeurs inquiets qui d’habitude ne votent pas comme l’UDC, on ne devrait pas dépasser les 40-45%.
Je crois qu’il y a aussi eu un apport très relatif, mais décisif de voix de la gauche (notamment à sensibilité écologiste ?) et du centre. En effet, aussi indécent que cela puisse paraître dans une Europe en crise, la croissance suisse a atteint ces dernières années un ryhtme qui, de toute façon, n’aurait pas été soutenable à long terme : les infrastructures ne suivent pas l’accroissement de la population et il y a notamment une pression énorme sur le marché de l’immobilier dans les régions les plus dynamiques (Genève-Lausanne, Zurich, etc.).
Si j’ai voté non, c’est parce que l’initiative UDC était une mauvaise solution, mais, pour une fois, j’étais obligé d’ajouter : à un vrai problème (ce n’était pas le cas avec l’initiative contre les minarets, par ex., qui créait de toute pièce un faux problème). Ces dernières années, l’immigration en Suisse a été de 80’000 personnes par an (au lieu des 8’000 attendus au moment de la signature de l’accord sur la libre circulation). Quand on vit entre Lausanne et Genève, on ne peut que constater que ce rythme n’est pas tenable. La population de la Suisse (7 mio d’habitants) ne peut pas s’accroître d’ 1 mio supplémentaire tous les 12-13 ans ! De ce point de vue, la libre circulation a créé un problème réel, qu’il aurait fallu tenter de juguler de toute façon en ramenant l’immigration à des proportions plus soutenables. Ce n’est pas être xénophobe que de reconnaître que l’immigration ne peut pas être illimitée.
Le vote de dimanche a souvent été présenté comme un vote anti-immigrés. Je ne pense pas que ce soit le cas (d’ailleurs, les actuels immigrés et frontaliers ne sont pas menacés, contrairement à ce qui est affirmé dans l’article à propos de ces derniers ; c’est dans les années à venir que les règles vont changer). C’est plutôt, en tous cas pour une part non négligeable de l’électorat, un vote sur la maîtrise de l’immigration.
Ce qui est intéressant, c’est que les régions où l’augmentation de la population crée des désagréments au quotidien (transports loyers, etc.) sont celles qui ont voté le plus massivement non. Preuve que l’initiative de l’UDC était perçue pour ce qu’elle est : une mauvaise solution.