Lettre ouverte aux syndicats de la fonction publique, en particulier de la SNCB
par Pierre-yves Lafleur, jeudi 22 décembre 2011, 19:13
Nous sommes nombreux en Belgique, surtout en Flandre, à nourrir un sentiment d'exaspération envers vos actions. Et pour cause :
Si vous êtes toujours les premiers à geindre quand vos droits - apparemment inaliénables - sont bafoués, vous êtes également les premiers à violer les droits des travailleurs à se rendre sur leur lieu de travail. Si la grève précédée d'un préavis est un droit précieux, les arrêts de travail sauvages et les barrages filtrant ne relèvent cependant plus du droit mais du délit, celui du trouble à l'ordre public, de la prise d'otage, du terrorisme syndical. Au choix. Ces comportements délictueux n'ont pas à être tolérés sous prétexte qu'ils s'inscrivent en marge de la protestation syndicale. Vous brocardez les "privilégiés du système" comme vous dites, mais quand il s'agit de votre privilège d'être payé pour se croiser les bras, vous en usez et en abusez. Il est si facile de faire grève sur grève quand on ne doit en assumer aucune conséquence financière. Et tant pis si vos victimes perdent une ou plusieurs journées de salaire, pour ces camarades-là il n'y a manifestement aucune considération qui tienne. Bien sur, vous nous direz la main sur le coeur - et l'autre dans la palette de Carapils - que ces incivilités ont pour but de faire prendre conscience de la situation à l'ensemble de la population. Autant nous traiter tout de suite d'imbéciles. Nous n'avons pas besoin de votre "aide", et encore moins de vos discours lénifiants, pour comprendre les tenants et aboutissants de la crise qui fait rage. Si nous condamnons ces grèves ce n'est pas par ignorance, mais parce que nous savons pertinemment bien qu'elles n'ont pas lieu d'être.
A longueur de déclarations vous pleurnichez sur votre sort de fonctionnaire, mais vous n'avez jamais un mot pour les indépendants et les patrons de PME qui sont au turbin 10h par jour, 6 jours sur 7, et qui ne s'offrent que 15 petits jours de congé par an, tout ça bien souvent pour des revenus modestes et une pension de misère. Oui, tous les indépendants ne sont pas des évadés fiscaux qui roulent en Mercedes classe C flambant neuve. Au contraire, ce sont statistiquement les travailleurs les plus mal lotis. Vous oubliez également que l'emploi est bien plus sûr dans le secteur public que dans le privé, et, soyons honnête, souvent moins exigeant. Alors qu'un simple manque de rentabilité suffit à perdre son emploi dans le privé où on ne compte pas ses heures sup', il faut commettre des fautes particulièrement graves pour être renvoyé de la fonction publique où l'on est pointilleux sur les heures prestées. Contrairement à votre logorrhée surannée, non, vous n'êtes pas à plaindre, et certainement pas les conducteurs de train aux 2100€ de pension mensuelle après 36 années de service ! Vos revendications, soit disant d’intérêt général, ne concernent bien souvent que vous et ne s’attachent qu’à la sauvegarde de ce genre de privilèges de fonctionnaire.
Vous persistez à rejeter toutes les réformes qui toucheraient à vos acquis sociaux, certes désagréables mais pourtant indispensables à la sauvegarde à long terme de notre modèle social. Nous n'avons pas le choix : ce que nous n'acceptons pas aujourd'hui se paiera double demain. Ne pas vouloir cotiser 2 années supplémentaires maintenant, c'est obliger les jeunes à bosser 5 ans de plus demain pour payer vos pensions plus vite acquises. Ainsi, à l'évidence, pour garantir votre petit confort, vous prêts à sacrifier les générations futures."Après nous le déluge", voilà ce que sous-entend réellement votre discours. Vous êtes de parfaits égoïstes. Vos "combats" ne témoignent que de votre mépris pour les autres travailleurs, pour la jeunesse, et de votre lâcheté, de votre incapacité à assumer vos choix politiques.
Si aujourd'hui vous pointez benoitement du doigt les banques et les grandes entreprises, ce marasme économique c'est pourtant bien à vous qu'on le doit !
Vous avez plébiscité des partis qui ont interdit l'emprunt à taux 0 auprès de la banque nationale en réservant le monopole de la création monétaire aux banques privées qui prélèvent des intérêts au taux variable. Vous n'étiez pas au courant ? Cette directive provient des traités européens signés sans broncher par les partis, de droite comme de gauche. La quasi totalité de la dette belge actuelle est ainsi composée des intérêts cumulés de cette dette depuis des décennies.
Vous avez défendu des politiques couteuses d'assistanat au détriment d'investissements dans des secteurs économiques porteurs. Investir dans la sidérurgie wallonne quand l'acier peut être fabriqué pour deux sous dans le Tiers-Monde, c'est aussi productif que d'investir dans la bougie à l'heure de l'électricité à bas coût. La sidérurgie wallonne est morte depuis longtemps, l'acharnement thérapeutique ne sert à rien. Vivez un peu avec votre temps au lieu de rester calés dans les Trente Glorieuses. Si vous aviez pris la peine d’ôter vos œillères idéologiques, vous auriez constaté que la situation économique a fortement changé, si bien que les acquis sociaux obtenus en période faste doivent inévitablement être revus pour être en phase avec la réalité actuelle. Les cotisations patronales et les retenues fiscales (qui sont parmi les plus fortes au monde) nécessaires au financement de l’Etat-Providence sont non seulement un véritable repoussoir pour les investisseurs, mais aussi un handicap pour le pouvoir d’achat de l’ensemble des citoyens. N'oublions pas que cette politique d'assistanat défendue bec et ongle par la Wallonie est l'une des pierres angulaires des tensions communautaires entre Flamands et Francophones qui pourraient bien déboucher sur la scission pure et simple du pays. Le syndicalisme wallon est, au même titre que le nationalisme flamand, un fossoyeur de l’Etat Belgique.
Vous avez soutenu des partis qui ont embrassé le libre-échange sans barrière et ouvert les frontières à la délocalisation. Cela a engendré une désindustrialisation du pays avec comme autre conséquence directe la nécessité d'accorder des cadeaux fiscaux aux grandes entreprises encore présentes pour éviter qu'elles partent, elles aussi, sous d'autres cieux plus profitables. Les niches fiscales, tant décriées par la gauche et l'extrême gauche, ne sont souvent qu'un moindre mal économique.
Au nom de la solidarité internationale, vous avez voté pour des partis qui ont favorisé l'immigration de masse de travailleurs non qualifiés en provenance de pays pauvres, ce qui permet une pression à la baisse sur les salaires. En effet, pourquoi revaloriser des emplois si des pauvres immigrés les acceptent avec des exigences salariales plus basses du fait de leur condition? Et faute de revalorisation, difficile d’inciter à l’emploi quand on gagne autant - voir plus - au chômage une fois les frais inhérents à l’activité professionnelle déduits. L'immigration de masse en période de chômage structurel est une infamie mainte fois dénoncée au siècle passé par de nombreux socialistes, dont Karl Marx dans Le Capital sous le vocable d’ « armée de réserve du capitalisme ». Si cela ne vous dit rien, renseignez-vous, il n’est jamais trop tard lire ce qu’écrivaient les figures historiques du socialisme à l’époque ou votre très chère Gauche était encore la Gauche.
Bref, cela fait 30 ans que vous votez comme des ânes pour des politiques irresponsables, avec votre confort à court terme comme seul objectif ! La dette, la crise, c'est à vous qu'on la doit. Certes vous ne l’avez pas explicitement voulue, mais comme le dit le dicton : « L’enfer est pavé de bonnes intentions ». Les politiques courtermistes en apparence bénéfiques que vous avez tant défendues étaient inévitablement désastreuses sur le long terme, encore fallait-il être capable de le comprendre, ce qui ne fut manifestement pas votre cas. Alors assumez votre incurie politique, ce ne sont pas aux autres, et encore moins aux générations futures, de payer pour votre aveuglément… ou alors n’osez plus jamais nous parler de solidarité.
«Que faisiez-vous au temps chaud ?
Dit-elle à cette emprunteuse.
Nuit et jour à tout venant
Je chantais, ne vous déplaise.
- Vous chantiez ? J’en suis fort aise.
Eh bien : dansez maintenant.»