Bion ben voilà, c'est fait, j'ai bouclé mon second marathon
Bon à des années lumières de Nikolas mais franchement satisfait ! J'ai pondu un compte-rendu pour moi à la base mais qui sait, peut-être que ça en intéressera certains et qui sait histoire de donner envie à certains de faire un marathon qui n'est pas aussi inabordable que l'on pourrait le croire
Maintenant repos pour 1 ou 2 semaines. La suite ce sera les 20km des Ardennes le 25/10 qui migre vers une version plus trail cette année, j'attends de voir çà !
Bonne sortie à tous et bonnes courses pour ceux qui en font lors de ces prochains mois
Et bonne m...
Nikolas pour ton marathon !
In Flanders Fields 2015 (Nieuwpoort - Ieper)
Il est à peine 8h30 quand j’arrive à la criée de Nieuwpoort (Vismijn). Tant mieux, j’aime être en avance pour m’imprégner de l’endroit. Les 1ers coureurs sont déjà là. Je m’en vais tranquillement à l’intérieur, une espèce de grand hangar qui sent le poisson à plein nez. Une odeur vivifiante à défaut d’être tout à fait agréable. L’agitation bat déjà son plein entre les coureurs qui viennent prendre leur dossard (que j’ai pour ma part déjà récupéré la veille) et les autres qui mangent, s’étirent, se reposent. Je décide pour ma part de me trouver une place à terre, histoire d’étendre mes jambes et de les masser.
20 minutes plus tard, je sors prendre l’air et marche vers le centre-ville en passant le long de l’eau, empruntant au passage les premiers hectomètres du marathon. Une fois assez loin, je m’échauffe en trottinant et en effectuant quelques tape-fesses, genoux haut et accélérations de temps à autre. Le tout pendant une dizaine de minutes tout en revenant vers la criée.
Comme d’habitude, cela provoque une certaine digestion et je profite pour faire un petit passage par les toilettes de chantier à plusieurs reprises jusqu’au départ. La file s’allonge évidemment plus le temps passe avec un certain délais la dernière fois à 9h40.
Au moment où je décide de reprendre mon chemin vers l’intérieur de la criée alors que je suis toujours à l’extérieur, j’entends un son mélodieux de cornemuse. Des airs que j’imagine dans la plus pure tradition écossaise s’ensuivent mais étonnement suivi d’un air bien connu d’un film tout aussi culte et digne de gamerz « Star Wars ». Il n’y a pas à dire, ça donne super bien. Le concert de ce monsieur la quarantaine à vue de nez enchaine les alternances entre morceaux connus et tradition, un vrai bonheur. L’apothéose ce sera lors de la venue quelques minutes plus tard alors que j’avais migré à l’intérieur de ce même joueur de cornemuse. Il n’y avait rien de plus galvanisant que ces airs qui résonnaient dans cet énorme hangar. J’étais prêt pour en découdre avec les 42km, marathon me voilà !
Il est 9h50, les appels vers la ligne de départ se font de plus en plus pressant. Je repère le meneur d’allure de mon objectif que j’espère je pourrai remplir même si je le sais un peu trop optimiste : 3h45. Mais qui ne tente rien n’a rien. Le speaker commence à réciter avec entrain le poème bien connu des habitués, emblème de la course dont le départ s’ensuivra une fois terminé :
Code:
Between the crosses, row on row,
That mark our place; and in the sky
The larks, still bravely singing, fly
Scarce heard amid the guns below.
We are the Dead. Short days ago
We lived, felt dawn, saw sunset glow,
Loved, and were loved, and now we lie
In Flanders fields.
Take up our quarrel with the foe:
To you from failing hands we throw
The torch; be yours to hold it high.
If ye break faith with us who die
We shall not sleep, though poppies grow
In Flanders fields.
John McCrae 1872-1918
Le signal de départ est donné, je suis Juan, le pacer (meneur d’allure) 3h45 et ses ballons verts qui virevoltent et qui parle un parfait néerlandais que je ne comprends pas du tout lorsqu’il converse avec d’autres coureurs. Je me concentre sur la route car les premiers hectomètres que j’avais repéré à l’échauffement plus tôt déboulent sur un goulot d’étranglement qui nous fera tenir un petit 5’48 pour le premier kilomètre. Tant mieux au moins je ne suis pas parti trop vite. Juan en profite d’ailleurs pour nous préciser (j’imagine) que l’on accélérerait la cadence dès que tout ce peloton compact se sera étiré. Le 2ème kilomètre est directement plus rapide à 5’15. S’ensuivront ensuite une série à cette même allure quasiment métronomique entre 5’10 et 5’15.
Je n’explique pas vraiment pourquoi mais j’ai souvent peu de contacts avec les autres coureurs sur des distances plus courtes, sur tarmac tout du moins. Par contre sur des trails et sur marathon, c’est tout l’inverse, une tout autre philosophie. On finit toujours par repartir de là avec cette impression d’avoir vécu quelques chose et d’avoir découvert plein de gens. Ca ne rate donc pas, un type me montre les magnifiques coquelicots qui bordent les bords de notre parcours. Orientant la conversation vers de l’anglais étant ignare en matière de néerlandais, nous parlons de nos origines respectives ce sur quoi nous n’allons pas plus loin. Je me fais du coup hélé par un autre coureur qui a entendu notre conversation en français cette fois et qui me demande si je suis un vrai marchois. Et c’est parti pour une longue discussion avec Patrick originaire de Bertrix qui lui en est sans doute à l’un de ses derniers marathons faute d’un genoux vieillissant et capricieux mais qui à l’apogée de sa forme au début des années 90 parcourait les marathons en 3h15. Il finira finalement celui-ci en 3h56.
Pour l’instant ça roule plutôt pas mal, j’aligne les 5’15/km tout en prenant de l’eau et des gels à chaque ravitaillement tous les 5km. Les 20ers kilomètres filent et me voilà à faire mon premier semi du jour en 1h50min17sec soit un nouveau record battu de quelques minutes. En effet, ce marathon est tellement plat (à peine des « bosses » de 5 mètres) que je vais plus vite sur semi lors d’un marathon qu’un semi seul dans ma région d’origine.
Je suis toujours proche de Juan que je scrute à ses ballons verts, je converse de temps à autre avec Patrick qui est en fait originaire de la région de Koksijde où il revient peu mais notamment pour voir sa famille qu’il reverra juste après. L’une des ses soeurs, marathonienne également, l’accompagnera même à vélo dans quelques kilomètres jusque la fin. Comprenant que je connais peu la région, il se transforme en guide touristique et m’informe de la signification des quelques bâtiments qui bordent notre route, proches ou lointains. Les kilomètres filent, je profite du paysage tout en apprenant les points d’intérêts de la région, que demander de mieux ?
Cependant, je me retrouve à ralentir légèrement le rythme à partir du km 23, je le laisse s’envoler devant moi, en tout cas pour le moment. A partir de là, sentant que je ne pouvais plus tenir le 5’10, je descends à 5’20, puis 5’30 jusqu’au 30ème kilomètre. Je me cramponne à cet objectif de finir les 33ers kilomètres en moins de 3h ce que je réussis en 2h56. Mais cela devient dur. Je suis rejoint par un Lillois avec qui Patrick discutait plus tôt et qui entame la discussion avec moi prenant ensuite le large devant moi accompagné de sa femme j’imagine qui le suivait à vélo. Je le reverrai quelques kilomètres plus tard un peu avant le kilomètre 30 pour un petit arrêt technique mais je ne le reverrai plus ensuite. Il avait pourtant l’air encore frais et rapide. Je me reformule un objectif histoire de me motiver. Il me reste 12km soit 1h12 à 6’/km soit une arrivée prévue en 3h52 si je tiens jusque là à cette cadence. Je décompte les secondes que je grappille au début (jusqu’à une arrivée potentielle en 3h51) et que je finirai par perdre plus tard.
Ca devient vraiment dur, je sens les crampes qui se pointent et je tiens tant bien que mal à rester sous les 6’/km symboliques certes mais importantes pour le mental. Je tiendrai finalement jusqu’au km 37 à partir duquel je sens des espèces de grosses boules notamment dans ma cuisse droite. Je lutte pour maintenir une certaine foulée tout en me préservant de ces crampes qui me feraient m’arrêter tout net si elles se déclenchent comme j’avais eu le cas l’année passée.
Les dix derniers kilomètres vont être interminables mais je me force mentalement à tenir. Je ne suis pas dans le dur à proprement parler. Ma fréquence cardiaque n’a jamais dépassé le 170 depuis le début alors que je monte souvent à 190-195 sur 10km. Mais les crampes me maintiennent à une allure que je trouverais légère habituellement. Comme nous sommes tous dans le même bateau (de manière volontaire certes), j’essaie toujours d’encourager ceux que je dépasse au ralenti sur le bord de la route avec une petite tape dans le dos et un « courage » que j’espère ils prennent comme quelque chose de positif dans ces moments compliqués.
Je me retrouve à courir avec Kurt qui m’a alpagué pour mon t-shirt portant la mention « Marche-en-Famenne » car il connait le trail « La Grimace » qui a lieu dans la région. Je connais bien sûr vu que c’est organisé par mon club dont j’arbore justement les couleurs (orange fluo et texte bleu foncé) et que j’ai déjà effectué l’année passée (trail de 28km mais distances de 55 et 80km aussi possible). Cependant il devra me laisser, victime de crampes, il finira en 4h11. Pareil avec Damien, un lillois avec qui j’irai jusqu’au km 37, il finira en 3h59.
La fin se déroule presque en solitaire, je croise cependant la route de Jean-Valéry que je dépasse toujours avec une petite tape dans le dos, qui me repasse plus tard en faisant pareil et ainsi de suite jusque la fin puisque nous terminerons dans la même seconde finalement sans avoir couru ensemble plus de quelques secondes.
Les deux derniers kilomètres sont les plus interminables malgré le fait d’avoir troqué les bords de l’Yser pour le centre-ville qui nous fait comprendre que l’on arrive au bout. Je me décide à forcer un peu malgré les crampes toujours proches de débarquer. Je boite presque mais je tiens néanmoins un honorable 6’15/km vu mon état physique. A 200 mètres de l’arrivée, des encouragements de mes enfants, mon épouse et d’amis me donnent les larmes aux yeux et surtout des ailes pour terminer ce marathon en mode sprint. Je ne ressens plus aucune douleur sur le moment, juste de la joie d’y être arrivé et pouvoir fêter cela en famille dans quelques instants. Je récupère un t-shirt et une médaille et mes douleurs reviennent tout aussi vite qu'elles avaient disparues, sacré cerveau. Mais je profite des masseurs disposés juste après l’arrivée pour les soulager et que je remercie grandement.
3h53 et des poussières, mission accomplie et objectif atteint. On verra pour descendre sous les 3h50 une prochaine fois. D’abord profiter de cet exploit en famille et les remercier de m’avoir supporté ce weekend avec toutes mes lubies du coureur à pied.